Coups d’accélérateur pour la transparence financière

Manifestation contre les paradis
fiscaux le 8 octobre à Paris.
(Photo : Xavier Schwebel/
Secours Catholique)

Alors qu’une centaine de pays de l’OCDE évaluent les accords de transparence passés avec les paradis fiscaux, la plateforme “Paradis fiscaux et judiciaires”, dont fait partie le Secours Catholique (point focal de Social Watch en France), met la pression sur les États invités au G20 de Cannes les 3 et 4 novembre.

La plateforme et plusieurs grandes ONG comme Oxfam, le CCFD-Terre solidaire, Transparency International ou le Secours Catholique dénoncent des accords de coopération fiscale inefficaces entre “paradis” et pays du G20.

Des centaines d’accords bilatéraux passés sous l’égide de l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) ont permis aux paradis fiscaux de sortir des listes noire et grise de l’organisation. Mais, dénoncent les ONG membres de la plateforme, « ces accords ne permettent pas réellement aux pays concernés de recouvrer les recettes fiscales perdues, selon un rapport de François Tcherkessoff publié par le Secours Catholique..

De plus, « une centaine de nouveaux accords ne permet pas aux États concernés d’échanger leurs informations », signale Mathilde Dupré, du CCFD. Ces accords ne sont d’ailleurs pas conformes aux standards internationaux, affirment les membres de la plateforme. Selon eux, « la France a signé avec les Iles Vierges britanniques, les îles Turques-et-Caïques ou l’Autriche, des accords qui ne garantissent pas la coopération ».

Pour sortir de cette impasse, il faut renverser la charge de la preuve, propose Grégoire Niaudet, du Secours Catholique : « C’est aux utilisateurs des écrans juridiques et des paradis fiscaux, à savoir les entreprises multinationales et les banques, d’expliquer ce qu’ils y font et non pas aux administrations fiscales de mener l’enquête », soutient-il.

Il s’agirait par exemple, à l’instar de la loi Facta aux États-Unis, d’obliger les intermédiaires financiers étrangers à communiquer des informations sur les comptes de leurs clients dans chaque pays où ils interviennent. Neuf régions françaises demandent d’ailleurs déjà à leurs partenaires financiers les impôts et taxes qu’ils versent aux autorités des pays où ils sont présents.

Autre solution : exiger des entreprises extractives la publication d’informations sur leurs activités, pays par pays.

La Commission européenne s’engage dans cette voie. Elle vient de proposer, le 25 octobre, que les grandes entreprises extractives et forestières européennes aient l’obligation de publier, pays par pays, projet par projet, leurs versements aux États où elles sont actives. Cette mesure prendrait la forme d’une modification des lois européennes (directives) sur la comptabilité.

La proposition rejoint la demande exprimée de longue date par les organisations non gouvernementales pour lutter contre la corruption, notamment en Afrique. L’objectif est de permettre aux organisations de la société civile de demander des comptes à leurs gouvernements. Il pourrait y avoir là de quoi commencer à tarir l’évasion fiscale à la source.

Six cents grandes sociétés sont concernées. Le patronat européen a manifesté son inquiétude : coûts supplémentaires, distorsion de concurrence entre européens et non européens, intrusion dans la souveraineté des États, a-t-il opposé au commissaire européen Michel Barnier, en charge du dossier.

Les nouvelles directives vont cependant être rapidement transmises au Parlement européen et au Conseil des ministres, en vue de leur adoption, annonce la Commission. Elles sont très attendues au Parlement, où des élus vont demander l’extension de l’exigence de transparence à l’ensemble des entreprises.

Source
Secours Catholique : http://bit.ly/6qHus4