BAHREÏN

Publication_year: 
2009
Summary: 
L’économie du Bahreïn s’accroit, ainsi que le revenu par habitant. Cependant, bien qu’il y ait de plus en plus de milliardaires, la classe moyenne se rétrécit et les couches populaires s’appauvrissent. Les affrontements et les tensions entre les groupes appauvris et les forces de l’ordre augmentent. Il faut élaborer d’urgence une stratégie protégeant la société des impacts négatifs de la mondialisation.

L’impact de la mondialisation chez le peuple bahreïni

Social Watch Bahreïn1

L’économie du Bahreïn s’accroit, ainsi que le revenu par habitant. Cependant, bien qu’il y ait de plus en plus de milliardaires, la classe moyenne se rétrécit et les couches  populaires s’appauvrissent. Les affrontements et les tensions entre les groupes appauvris et les forces de l’ordre augmentent. Il faut élaborer d’urgence une stratégie protégeant la société des impacts négatifs de la mondialisation.

Depuis toujours le Bahreïn a eu une économie ouverte au commerce, aux investissements  et à l’échange de biens. Depuis son indépendance en 1971 le pays est une place financière pour les banques internationales, les institutions financières, les joint ventures  du Conseil de Coopération du Golfe (CCG) et un  carrefour pour le commerce et les biens de consommation.  Il fait partie de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et il a éliminé les obstacles au commerce, aux  investissements et à la circulation de la main d’œuvre et a signé avec les États-Unis un Traité de Libre Échange (TLE). En tant que membre du CCG le Bahreïn négocie la mise en place d’un TLE  et il a été récemment l’hôte d’une conférence de l’Association des Nations de l’Asie du Sud-Est  (ANASE) et du CCG, qui a débattu des perspectives de la signature d’un TLE entre les deux groupes économiques.

Comme dans beaucoup d’autres pays, la mondialisation a influencé Bahreïn  de manière positive aussi bien que négative. Le rapport ci-dessous analyse l’impact de la mondialisation sur le bien-être des  Bahreïnis à plusieurs points de vue :

La libéralisation de l’économie

Le Gouvernement a constamment poursuivi l’objectif de libéraliser l’économie, ceci signifiant de moins en moins de participation de l’état dans la gestion économique.
Cela a mené inévitablement  l’État à  abandonner la prestation de certains  services essentiels qu’il offrait auparavant à ses citoyens. Cela a également ouvert le marché à la libre concurrence avec des entreprises nationales et étrangères. D’autre part la réduction des restrictions pour les résidents étrangers leur a permis d’occuper des postes de travail jusque là réservés aux Bahreïnis, comme ceux de conseillers  juridiques et d’auditeurs.

La privatisation

Le Gouvernement a fait appel à la privatisation de plusieurs institutions et services publics  parmi lesquels l’électricité et le transport public, afin de se mettre au pas de la mondialisation et d’être à même de pouvoir concurrencer un marché ouvert. Le nombre des secteurs ouverts au contrôle privé comme  l’éducation, les soins sanitaires, divers services municipaux, l’administration portuaire et le transport aérien, a d’ailleurs augmenté.

Le logement

Le Gouvernement a progressivement annulé  les restrictions qui interdisaient d’acquérir des biens immobiliers aux étrangers résidant à Bahreïn, notamment aux citoyens appartenant au CCG. Cela a entraîné une hausse du prix des terrains et des  biens immobiliers dans les quartiers résidentiels. A l’heure actuelle les Bahreïnis sont désavantagés par rapport à d’autres citoyens du CCG, en ce qui concerne le pouvoir d’achat. Ceci a amené une crise considérable du logement : la demande de logements subventionnés par l’état dépasse l’offre ; actuellement il y a une liste d’attente de près de 60.000 demandes.  En conséquence, plusieurs familles ont dû emménager chez des parents dans des logements mal équipés pour héberger des locataires trop nombreux.

L’emploi

Les Bahreïnis qui cherchent un poste de travail se trouvent en position de faiblesse pour concurrencer des postes exigeant des compétences et une formation académique spécifiques, à cause de la rareté de contrôles sur le flux de travailleurs étrangers, notamment de la main d’œuvre bon marché. Les travailleurs étrangers sont plus disposés à accepter des bas salaires et des conditions de travail plus dures. Par conséquent, malgré l’augmentation des possibilités d’emploi générée par une économie florissante, le chômage s’accroît parmi les citoyens bahreïnis, surtout parmi les femmes et les personnes ayant des formations qui ne s’adaptent pas aux nouveaux emplois  (par exemple, les arts libéraux ou la sociologie).

L’inflation

Le taux d’inflation augmente constamment : ces dernières années il a dépassé les 7 % annuel. Il n’y a eu aucune hausse importante des salaires, notamment dans le secteur public. En tenant compte de cette situation, le parlement est convenu de donner un bonus annuel de  50 BHD ( 133 USD) aux familles bahreïnies pendant les deux ans à venir. Cependant cette somme n’arrive pas à atténuer l’impact de l’inflation sur  la plupart des travailleurs, y compris les résidents étrangers ayant de faibles revenus qui sont dans la même situation, touchant des salaires qui demeurent en total décalage par rapport à l’inflation. Le décalage augmente entre une minorité aux revenus très élevés et la plupart des habitants ayant des revenus très bas. Quelques familles bahreïnies  vivent avec 120 BHD par mois (319 USD). Bien que le gouvernement dénie cette pauvreté relative, elle a été détectée  par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD)2.

Le changement du tissu social. L’augmentation permanente du nombre de travailleurs étrangers venant surtout de l’Asie  pendant la dernière décennie a augmenté la population étrangère, de 37 % sur la population totale en 2001, à 50 % en 2007. Cela a provoqué une altération du tissu social. Les travailleurs étrangers ont tendance à vivre dans des camps de travail, voisins des communautés locales mais isolés de celles-ci, dans les zones abandonnées des villes. En général ils ne s’intègrent pas à la vie publique ni aux activités sociales ni aux ONG. Ils vivent seuls dans la plupart des cas, sans  leurs familles, ce qui est perçu comme une déviation des habitudes sociales et a créé des problèmes entre les deux communautés, surtout chez  celles qui sont  voisines. Il est fréquent que leur niveau de vie inférieur et leur absence de vie sociale créent un milieu propice aux délits, principalement les agressions sexuelles, les cambriolages, les vols et les atteintes physiques. Les conditions précaires de vie, la maltraitance des patrons, comme la rétention des salaires souvent pendant des mois, ont mené beaucoup de travailleurs étrangers au suicide pour endettement et incapacité à effectuer des virements à leurs familles demeurées dans leurs pays d’origine.

Conclusion

Bien que l’économie bahreïnie  soit florissante et qu’elle ait un taux de croissance élevé et des revenus qui augmentent par habitant, les avantages de la mondialisation ne bénéficient pas à l’ensemble de la population. La quantité de milliardaires augmente, la classe moyenne se rétrécit et les couches populaires s’appauvrissent. Le pays a été témoin de plusieurs affrontements  et tensions entre les communautés appauvries et les forces de la sécurité, notamment dans les villages. À cause de cela la Banque Mondiale a descendu  Bahreïn de son rang dans le classement de stabilité politique3. D’ où l’urgence de la mise en place d’une stratégie protégeant la société des impacts négatifs de la mondialisation.

1 La coalition Social Watch Bahreïn est intégrée par Transparence Bahreïn, la Société des Droits Humains de Bahreïn, la Société pour la Renaissance des Femmes Bahreïnies, la Société des Femmes Awal et la Société des Sociologues.

2 Le rapport de développement humain 2007 - 2008 du PNUD accorde à Bahreïn 0,88 points dans l’indicateur de développement humain, malgré le formidable revenu 20.800 d’USD par habitant.

3 Le rapport Governance Matters 2009: Worldwide Governance Indicators, 1996-2008 de la Banque Mondiale montre que la position de Bahreïn est montée au-dessus de 0,50 seulement en 2003. Elle est constamment descendue jusqu’en 2007 et a légèrement augmenté en 2008 à 0,36. Voir : <info.worldbank.org/governance/wg/pdf>.

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